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Association des
Amis du Vieil Arles

L’historique de l’association est tiré de la conférence donnée par le président lors de la célébration en 2004 du centenaire de la Société des Amis du Vieil Arles, fondée en 1903 (bulletin double spécial numéros 123 et 124). Il est précédé d’un texte plus général sur l’histoire d’Arles depuis sa fondation jusqu’à la fin du XXe siècle.

Histoire

La remise en ordre, les progrès techniques qui suivent la Première Guerre mondiale ainsi que l’arrivée d’un maire pugnace, Joseph MORIZOT, vont favoriser deux choses.

D’abord un ancrage patrimonial et une reconnaissance officielle du patrimoine monumental. La mise en place de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques en 39 articles ne sera vraiment appliquée qu’en mars 1924 et affinée en juillet 1927 !

Ceci fut un moteur non négligeable à Arles d’un certain développement économique avec l’évolution des services qui voient la mise en place d’un processus de restauration plus ou moins continu et non plus au coup par coup avec les Monuments historiques représentés à Arles par Auguste VÉRAN, premier président des AVA.

L’État va progressivement se substituer vers 1925 aux associations, comme avaient commencé de le faire les AVA, pour définir et réaliser pécuniairement les programmes.

 

La deuxième avancée va être en conséquence l’évolution de la ville avec l’augmentation en puissance de la prise de conscience du patrimoine par les municipalités depuis Jacques MARTIN jusqu'à Joseph MORIZOT.

Alors que jusque-là, Arles était encore considérée comme un lieu de passage pour voir les restes romains et romans en l’état, un lieu de détente romantique (les Alyscamps en particulier) et de curiosité plaisante... de découvrir les Arlésiennes dont la beauté est très souvent brocardée à juste titre (il faut voir certaines cartes postales éditées d’Arlésiennes en costume avant 1901 qui ne les flattent guère !).

Ajoutons à cela le soleil, les Arènes, les courses de taureaux et les fêtes, la Camargue proche, c’était cela le pays d’Arles presque comme aujourd’hui encore !

 

La fondation des Amis du Vieil Arles qui essaya de penser le patrimoine autrement, par son programme, fut un signe fort et irréversible pour asseoir une certaine identité arlésienne

Malgré cette réglementation lente à mettre en place et la bonne volonté du maire MORIZOT qui le fut jusqu’en 1932, il fallait de l’argent et des hommes ! (Rien de nouveau).

L’argent, on peut en trouver, mais des hommes pour poursuivre l’œuvre naissante des AVA ?

La guerre de 14-18 avait moissonné les jeunes générations, mis en sommeil tous les ténors de l’association qui ne relancèrent ni le bulletin, ni l’association telle qu’elle était avec son programme.

 

La plupart de ces derniers, âgés et fatigués, ont poursuivi leur action dans la cité, mais dispersés au sein d’organismes plus actifs comme le Syndicat d’initiative ; par exemple, le Dr URPAR, Auguste LIEUTAUD, JOUVE, Louis AUBERT et Auguste VÉRAN. Ce sont eux, entre autres, qui recevaient les visiteurs d’Arles jusqu’en 1936 pour leur faire découvrir la ville.

Ils s’intitulaient “membres de la Société des Amis du Vieil Arles”, alors que l’association en tant que telle n’existait plus ; c’est dire l’attachement à notre Société qui restait dans la mémoire des Arlésiens.

Ainsi, Auguste LIEUTAUD fut le fondateur de l’hôtel Jules César au niveau de la chapelle de l’ancienne Charité, car il a paru à l’époque nécessaire à la ville et au Syndicat d’initiative “d’avoir enfin à Arles un hôtel de confort moderne (mieux que le Nord-Pinus ou le Forum trop petits) dont la nécessité se faisait de plus en plus sentir depuis l’extension, après la guerre, du tourisme et l’affluence d’étrangers qui s’arrêtaient à Arles pour connaître la ville et les vestiges de monuments à la splendeur passée” (Journal Le Petit Marseillais, 1926).

On voit là les mots peu valorisants de : simple arrêt, vestiges, splendeur passée qui indiquent bien l’idée que l’on se faisait, à l’extérieur, de notre ville !

 

D’autres comme les frères DAUPHIN, en délicatesse avec les AVA comme on l’a raconté, malgré leur fidélité au personnage d’Émile FASSIN, ont pris une autre direction temporairement extra arlésienne. Rappelons qu’Armand DAUPHIN fut aussi le directeur et un des rédacteurs de la revue « En Provence » toujours recherchée de nos jours pour ses articles de 1923 à 1925. Notons encore que Armand DAUPHIN, décédé en 1956 à 91 ans, fut un défenseur acharné comme son frère du Vieil Arles mais à sa manière. Il fut même après 1940, jusqu'à sa mort, le dernier bastion de résistance portant fièrement la devise AVA dans la presse locale.

Son dernier combat, perdu malheureusement, fut celui d’essayer de sauver l’église St Pierre de Trinquetaille et surtout son clocher, seul resté debout avec la statue en pied de St Pierre, lors des bombardements. Malgré une polémique argumentée, l’architecte VAGO fit abattre en 1951 tout le bâtiment lors de la réhabilitation d’Arles en 1953. (La célébration du 50e anniversaire de l’église St Pierre de Trinquetaille aura lieu les 30-31 mai et le 1er juin 2003 pour fêter son jubilé et rappeler l’historique de ce quartier d’Arles.)

 

Émile FASSIN, à la santé déjà diminuée en 1903, animateur malgré tout de la Société n’eut pas la force de redémarrer un bulletin ; il est décédé en 1922. Les LACAZE-DUTHIERS, TAILLEFER, MARTIN-RAGET, CHIAVARY, déjà âgés en 1903, n’eurent pas la relève que l’on pouvait escompter.

Auguste VÉRAN fut le cas à part, je vous renvoie à la belle publication réalisée en 1998 par les Archives municipales d’Arles avec leur exposition consacrée à ce personnage qui décéda en 1927.

Premier président des AVA comme on l’a vu, il assura à lui seul une continuité de restauration, de mise en valeur du patrimoine en temps qu’inspecteur des Monuments historiques jusque vers 1925 avec trois maires différents et successifs, qui avaient tous compris l’intérêt d’embellir de la sorte leur ville : NICOLAS, GRANAUD et MORIZOT.

Citons pêle-mêle la Bourse du travail, la couverture de la roubine du Roi jusqu’aux tours de la Cavalerie restaurées, l’Hôtel des Postes et l’Archevêché voisin remis en état, les Thermes de Constantin ou Palais dit de la Trouille (ce fut le premier grand article publié par l’auteur dans le bulletin des AVA), le Museon Arlaten avec sa basilique judiciaire découverte par Jules FORMIGÉ et mise en valeur par le même VÉRAN, le cirque romain dégagé en partie lors de travaux en relation avec le canal d’Arles à Bouc, enfin citons les cryptoportiques avec le Forum souterrain.

Tous les travaux purent être publiés dans le bulletin, dont la parution cessa en 1913, mais grâce aux AVA et à Auguste VÉRAN et sa double casquette, tous les édifices remis en état purent être classés sur la liste des Monuments historiques ou mis à l’inventaire.

Mentionnons l’arrivée de Jules FORMIGÉ à Arles : sa thèse de doctorat sur les antiquités de la ville en 1912 va être le départ, après la première guerre, d’un nouvel élan et d’un renouveau de l’archéologie arlésienne. De par sa position d’inspecteur des Monuments historiques, on va mieux récupérer les objets, on va commencer à les présenter mieux, à communiquer mieux, mais Jules FORMIGÉ malheureusement va quitter ce monde en 1927.

 

Les journaux de l’entre-deux-guerres, locaux ou régionaux (Homme de bronze, Gazette des Bouches du Rhône, Forum républicain) n’avaient de cesse, selon leurs penchants politiques soit d’encenser, soit de critiquer systématiquement le maire MORIZOT !

Ils prenaient à témoin les Arlésiens en un style imagé, percutant et même à la limite de la correction, à propos des restaurations du patrimoine avec cette analyse plus politique contre les décisions du pouvoir en place plutôt que de chercher à trouver un consensus patrimonial acceptable pour tous.

On peut voir là le développement de l’enjeu économique, en plus de son côté historique habituel, que ce patrimoine présentait véritablement peu à peu !

Un exemple à citer : celui du Théâtre antique qui, dégagé durant des années à partir de 1910 par FORMIGÉ et VÉRAN, se vit équipé de gradins de pierre de remplacement, ce qui paraît logique compte tenu de l’usage de ce lieu.

Le Petit Marseillais en 1933 disait : “on reconstruisit plutôt qu’on ne reconstitua, dans un but utilitaire, les gradins et les voûtes de l’ancienne cavea, faisant ainsi disparaître sur cette partie du monument les vestiges antiques, les seuls cependant qui puissent offrir un réel intérêt aux connaisseurs, sous un amas de maçonnerie nouvelles qu’on barbouillait ensuite d’eau boueuse afin d’y simuler la patine du temps”.

L’on voit ici écrit (en 1933), la nouvelle façon de penser qui doit présider à la mise en valeur du patrimoine monumental, appliquée de façon discutable par Auguste VÉRAN et Jules FORMIGÉ, pourtant hommes d’élite de leur temps !

Cette mise en valeur, aujourd’hui, se décline toujours de cette façon-là, même si elle apporte aux amoureux inconditionnels du patrimoine des frustrations, afin de garder utilitaire un monument qui doit bénéficier de l’emploi de certains matériaux modernes à propos desquels les AVA répètent sans cesse… depuis 1903, qu’il faut bien y réfléchir dossier par dossier !

La critique de la reconstruction pour la reconstruction avec les expédients de rénovation est déjà posée ici en même temps que le respect que l’on doit porter aux vestiges même mineurs et à leur valeur historique.

La nomination de Fernand BENOIT vers l’année 1925 à Arles, avant de rejoindre plus tard Marseille, apporta ce plus incontestable à notre ville.

Conservateur éclairé, en accord avec les principes et le décret d’application des Monuments historiques de 1924 (modifié en 1940 ensuite), il effectua de très nombreux travaux et rédigea de nombreuses publications à propos du Pays d’Arles. Rappelons que les articles arlésiens furent publiés dans les “Mémoires de l’Institut historique de Provence” depuis sa fondation en 1927 jusqu’en 1940.

On va trouver plus de 50 références arlésiennes. Par exemple :

  • Montmajour, le monument-phare classé en 1927.
  • Les Cryptoportiques restaurés d’abord par VÉRAN et bien expliqués par F BENOIT.
  • La meunerie romaine de Barbegal restaurée.
  • Les fouilles de Trinquetaille et aux Alyscamps avec les sarcophages paléochrétiens.
  • La voie romaine de Trinquetaille en 1933 au niveau de la gare des cars de Camargue.
  • La muséographie du Musée lapidaire (Ste Anne) et celle du musée d’Art chrétien (créé en 1937), excellemment mis en valeur pour la connaissance, à partager par tous, des richesses du sol arlésien.

Mais Fernand BENOIT n’a pas de bulletin des AVA à sa disposition, aussi ses publications sont-elles multiples, techniques, disséminées dans de nombreuses revues régionales et nationales !

À ce moment-là, les montages financiers sont à peu près les mêmes que maintenant avec la nécessaire contribution de la ville à hauteur de 25% pour les restaurations proposées. La ville d’Arles traîne un peu les pieds car le maire a beaucoup de travaux d’urbanisme, de viabilité (le macadam remplace peu à peu les calades), d’assainissement, de festivités, de salubrité publique, etc.

On s’aperçoit bien que les LIEUTAUD, AUBERT et Armand DAUPHIN, les seuls qui restent et qui peuvent s’exprimer au nom des Amis du Vieil Arles, ne sont plus véritablement présents. Ils ne pèsent plus trop sur les décisions, mais la presse et les habitants touchés par certaines contraintes patrimoniales font toujours référence à notre association inscrite profondément dans la mémoire collective, mais qui, en fait, devenue un grand méchant loup, n’impressionne plus personne !

L’absence d’entretien pendant cette période avec la perte de l’intérêt des Arlésiens pour le périmètre intra-muros, hormis pour les grands monuments connus, la dureté de la vie de tous les jours, industrielle en particulier, furent les principales causes du vieillissement accéléré des immeubles et de ces monuments, et ce, en dépit de la puissance de travail de Fernand BENOIT, souvent absent d’Arles à son corps défendant.